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apporté, il la changea aidé maladroïtement par la mère qui geignait, ce faisant.

— Quel malheur qu’un si beau corps de fille aille pourrir sous terre ! disait-elle.

— Mais il n’est pas près d’y aller, j’en réponds ! fit Daniel irrité, en s’apercevant que la malade avait saisi quelque chose de cette phrase imprudente. Tenez, regardez plutôt comment il faut s’y prendre pour la changer !…

Sorti de la chambre, Daniel chapitra la Cadettes sur sa bêtise, et puis lui recommanda de faire bouillir le linge souillé dans du « lessif » et de le laver à l’eau courante.

— Vous me reverrez bientôt ! ajouta-t-il en partant.

Pendant toute une semaine il accourut ainsi, deux ou trois fois le jour épier, inquiet, la marche de la maladie. Parfois il quittait le lit de la petite pour aller querir quelque remède dont il espérait un bon effet, et revenait en hâte le lui administrer.

Le huitième jour, il constata l’apparition, sur la partie inférieure de la poitrine, de menues taches roses saillantes. Puis ce furent des vésicules grosses comme des grains de mil, pleines d’un liquide aqueux et transparent. Simultanément, la petite malade était dans une prostration profonde, et sa langue et ses lèvres se couvraient d’un enduit fuligineux que le docteur enlevait délicatement avec un linge fin. Quotidiennement se produisaient de nouveaux symptômes redoutables, en même temps que s’aggravaient les anciens. De toute cette seconde période, Daniel ne quitta guère le moulin, surveillant avec une anxiété sincère l’évolution de la maladie dont la violence allait toujours croissant. La pauvre Sylvia délirait sans cesse ; ses membres se raidissaient avec