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il venait d’arrêter son attelage à l’extrémité d’un sillon, le nez au fossé, et le laissait souffler, la main sur la corne d’une de ses bêtes, lorsque soudain, au bout de l’allée, il aperçut Minna qui se dirigeait vers le Désert au pas pressé de sa jument.

Sa résolution étant prise de ne plus penser à sa cousine, Daniel eût préféré de beaucoup ne pas la revoir. Et puis, pressentant ce qu’il allait advenir, il fut vivement contrarié. « Elle est folle ! » se dit-il.

Arrivée à sa hauteur, Minna l’interpella familièrement de sa petite voix grêle :

— Hé ! l’homme ! votre monsieur est-il à la maison ?

Et, tout à coup, l’ayant reconnu, elle s’écria :

— Dieu que vous êtes vilain, Daniel !… Et comme ce sale vêtement de paysan est bien celui qui vous sied le mieux !

— Je ne vous contredirai pas, ma cousine.

— Votre cousine ! fit-elle. Je vous défends de m’appeler ainsi !

— Que vous le veuilliez ou non, vous l’êtes. Mais ne craigniez rien, je n’en abuserai pas.

— Vous êtes un insolent !

— Voyons, Minna, voyons !… Vous n’êtes pas venue, sans doute, exprès pour me dire des sottises !

— Si ! je suis justement venue pour vous dire que vous vous êtes conduit ce matin comme un rustre ; que votre grossièreté est inqualifiable et que vous n’êtes qu’un pacant !

Ici la Grande voulut prendre la défense de son cher « petit » ; mais, de la main, Daniel lui imposa silence.

— Là, là, doucement, Minna ! fit-il encore, pendant que la Sicarie grondait sourdement comme un chien fidèle.