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homme de prêtre, nous ferons un bout de chemin ensemble : justement, j’ai à causer d’une petite affaire avec monsieur le docteur.

— Qu’il s’agisse d’une affaire, soit ! fit le notaire en guignant la bonne mine du curé ; si vous disiez que c’est pour une consultation, personne ne voudrait vous croire !

Le curé sourit en regardant Daniel d’un air d’intelligence qui fut désagréable à celui-ci : Minna, sans doute, avait avoué à son confesseur de campagne les petites privautés qu’elle avait laissé prendre à son cousin, et le regard de ce confident les commentait avec une indulgente malice. Mais non ! le jeune homme, en cheminant, apprit bien vite pourquoi l’abbé avait ainsi l’air satisfait : c’est qu’il avait deviné juste au sujet de Fréjou.

— Vous savez, mon cher monsieur, ce que je vous dis lorsque vous vîntes au presbytère en quête de renseignements ? Eh bien, je ne m’étais pas trompé ! Le voisin consentirait à assainir le bourg, à se préserver des fièvres, lui, sa famille et ses voisins, moyennant dix écus par an. La pêche de son étang n’a guère donné, ce carême, parce que les loutres s’y étaient habituées : c’est pourquoi il ferait ce « sacrifice », comme il dit en geignant.

Et le bon curé eut un rire joyeux.

— Ma foi, répondit Ie docteur, quoique je ne sois pas riche, pour la rareté du fait, je veux bien faire une fois l’expérience de payer les gens afin qu’ils se laissent guérir !… Un de ces jours, je passerai à la Jemaye m’entendre avec ce finaud de Fréjou.

— À votre service, si je puis vous être utile ! fit le curé.

— Je vous remercie, ce n’est pas de refus.