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sine, n’était qu’une jeune fille frivole, vaine, inconstante, coquette, indigne d’un amour sérieux comme celui qu’il avait ressenti pour elle ; et, en conséquence, il prenait avec énergie la résolution de ne plus songer à celle qui l’avait oublié.

Il se décidait, justement, pour cette conclusion, lorsqu’il ouït en avant le pas d’un cheval venant de son côté. Or, voici que tout à coup, au tournant du chemin, apparut sur sa petite jument grise Minna fraîche, rose et souriante. Elle eut, en le voyant, un petit cri d’étonnement joyeux et poussa vivement sa bête.

— Bonjour, Daniel ! J’allais chez vous.

— Bonjour, ma cousine, dit-il, un peu embarrassé,

— Cette visite n’a pas l’air de vous réjouir ?

— C’est que vous ne m’avez point accoutumé à de telles marques d’intérêt.

— Comment cela ?

— Vous le demandez ! fit-il avec impétuosité.

Alors, subitement, il dit quelles inquiétudes, quelles tristesses, quels tourments il avait endurés pendant ces cinq longs mois, son chagrin de se voir ainsi négligé, ses regrets, ses colères, et enfin la résolution héroïque à laquelle tout à l’heure il s’était arrêté.

Il parlait avec véhémence, et, sans une pause, il exhala tous ses ressentiments amassés, toute l’âcreté qu’il avait sur le cœur. Cependant Minna, de son petit mouchoir de batiste, essuyait ses yeux humides.

— Mais je ne vous avais pas oublié ! dit-elle.

— Alors, pourquoi ne pas m’avoir donné le plus petit signe de vie ?

— Je ne le pouvais pas…