Page:Eugène Le Roy - L’Ennemi de la mort.djvu/100

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Mais moi, je fais tourner la baguette tout comme vous.

— Alors, c’est que vous avez le don !

— Je la fais même tourner sur un lieu dépourvu d’eau souterraine.

— En ce cas, c’est que le diable s’en mêle !…

Le docteur ne répliqua pas ; puis, comme tous deux arrivaient à la rencontre d’un chemin qui menait au Désert, il se sépara de l’adjoint-sourcier en lui disant :

— Eh bien, cette après-dînée, si vous avez le temps, j’irai chez vous.

— Venez : j’y serai, n’ayant rien à faire d’autre…


Après avoir dîné, Daniel s’en fut donc à Échourgnac.

Çà et là, éparses dans un terrain vague, pelé, où luisaient des flaques d’eau croupie, six ou sept maisons basses en bois et torchis, aux murs déjetés, crevassés, flanquées de sordides étables et de tas de fumier, formaient avec la maison curiale et la chétive église en pierre de « grison », tout le petit bourg qui était comme la capitale géographique de la Double. Autour de l’église était le cimetière, semblable à un champ fraîchement labouré. Devant les portes des habitations, des bruyères pourrissaient dans un infect purin noir, produit de déjections humaines et animales. Tout cet ensemble avait un indicible aspect de misère et de saleté.

Devant l’une de ces maisons étayée d’une jambe de force, se dressait un mai portant à sa cime une loque pendante qui avait été un drapeau blanc. Au-dessous de la tuilée, dans un chambranle, était planté une branche de pin.