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VENDÉMIAIRE

Dans les villages campés sur les coteaux pierreux, on entend le menuisier rustique radouber les barriques. Après en avoir défoncé quelques-unes par un bout pour porter la vendange au cuvier, il les répare toutes, remplace les cercles cassés, change les vîmes rompus et calfate les fentes avec du chanvre et de la pâte de farine délayée à froid.

Ses instruments sont peu nombreux : une erminette, un coin de bois et son couteau. Avec quelle adresse il fend l’osier en trois, un brin dans chaque main, le troisième dans la bouche ! Et lorsque le cercle est lié à la juste mesure, ce tonnelier d’occasion le chasse sur la barrique avec l coin et la tête de l’erminette en guise de maillet. À mesure qu’il fait le tour à petit pas, chaque coup sonore s’entend au loin : pan… pan… pan…

Maintenant, dans le ruisseau, ou le « lac » voisin, les barriques gonflent, et au premier jour on vendangera. Après l’antique ban de moisson, le ban de vendange a été enfin aboli : chacun commence à son heure, selon la maturité ; en général plus tôt que plus tard : on ne sait ce qui peut arriver. Puis les chiens des villages mangent les raisins ; et on se méfie aussi un peu des nocturnes larrons, malgré le vieux proverbe :

La paù gardo las vinhas.