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FRUCTIDOR

Les branches des pruniers pendent lourdement sous le poids des fruits ; les poires juteuses attendent le couteau ; les abricots offrent leur chair parfumée ; les pêches rouges et duvetées comme la joue d’une belle drole de village, appellent les morsures ; et sous la treille, les grappes transparaissent aux rayons du soleil comme des grains d’ambre.

À la vesprée du dimanche, il fait bon pour les amoureux s’en aller dans les chemins creux, infréquentés, les bras noués, les hanches jointes, et, entre deux baisers, cueillir la noisette qui pend dans sa gaine verte.

Mais, dans la semaine, il faut peiner et suer, car la besogne est là, et le soleil est chaud :

Cal que setenbre fonde lou ploum, dit un proverbe ordinairement vérifié.

Les métives finies, à peine les glaneuses ont-elles passé dans le champ moissonné où les perdrix à leur tour cherchent les grains tombés de l’épi, qu’il convient de semer les raves. Saisissant l’à-propos d’une pluie bienfaisante envoyée par le mystérieux « Aversier », l’homme vient avec ses bœufs liés, et laboure les « retoubles ». En même temps que le chaume, son araire ensevelit sous la terre humectée, les coquelicots, les pieds d’alouette, les bleuets, la matricaire inodore, la pastenade ou carotte sauvage, l’ivraie enivrante, appelée « virajo »