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MESSIDOR

Le nom résonne comme un appel de clairon. Messidor !… Et dans un ciel d’apothéose, sous les rais brûlants du soleil solsticial, flambent les visions d’épopée de la grande Révolution !… Messidor !… Et les ancêtres des temps héroïques, les géants des grandes luttes qui nous ont affranchis, apparaissent superbes dans le recul d’un siècle ! Chacun son lot : à ces vaillants les faits éclatants, les dévouements mortels et le nimbe radieux de l’histoire ! à nous le labeur obscur, l’effort quotidien, et la tâche ardue de faire aboutir la Révolution à une réalité sociale palpable et concrète pour tous…

Au pied du clocher, sur la « cafourche » élargie qui est la place du village, les gens apportent du bois, des fagots, des sarments, et autour d’une grande perche fichée en terre dressent en hauteur le feu de la Saint-Jean. Par dessus les fagots on jette des branches de pin, de genévrier et puis du feuillage de senteur, fenouil et menthastre. À la cime on attache un beau bouquet de lis, de roses, et des herbes « joventes » de la Saint-Jean.

Le soir venu, les grands « droles » brandissent à force la cloche au son grêle, et tout le monde s’assemble sur la place. Alors, à l’heure de l’Angelus, dans le crépuscule qui descend sur la terre, le portail de la vieille église s’ouvre, et le curé, en chape, précédé de son marguillier portant le seau