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GERMINAL

De la terre échauffée par les rayons du soleil vainqueur de l’hiver, montent des senteurs champêtres. Au bord des prés, le long des chemins, fleurissent les peupliers, les frênes, les ormes, et les érables, que nous appelons « azeraüs ». Sous les futaies, au bas des talus rocheux, les pervenches tapissent le sol et, le long des haies — des « randals » — les prunelliers développent leurs fleurs blanches. Au milieu des bruyères, les genêts à balais, les ajoncs, se couvrent de fleurs d’or ; et, dans les taillis où brille l’écorce argentée du bouleau, les bourgeons s’entr’ouvrent au souffle tiède du printemps.

C’est le renouveau de l’année ; la terre s’éveille après le sommeil hivernal. Dans les buissons, les oiselets volètent ; les pinsons chantent dans les vergers et, dans les pêchers fleuris et les amandiers aux fleurs neigeuses, les chardonnerets se poursuivent et font l’amour.

Partout la sève monte sous l’écorce des arbres, et les « drôles » font des sifflets et des « charamèles » en tapant à petits coups avec le manche de leur couteau sur un bout de lilas ou de saule. Il semble, en prêtant l’oreille, qu’on entende un bruit léger, comme la germination des plantes sortant lentement du sein de la terre en gésine.

Sur les coteaux pierreux du Périgord, le paysan fouit sa vigne. Devant lui, sa femme, en chemise de grosse toile par-dessus ses cotillons, ramasse et