connaissant qu’il avait affaire à de braves gens.
Chez nous, il y venait bien, mais pas souvent, se méfiant que, de ce côté-là, on surveillait davantage. Et en effet, un matin, deux heures avant la pointe du jour, quatre gendarmes vinrent entourer la maison, croyant le surprendre, mais ils en furent pour leur chevauchée de nuit. Il ne se passait guère de jour, non plus, que Mascret et l’autre garde ne vinssent rôder par là ; mais pour guetter autour de la maison après le soleil couché, ils n’osaient, sachant qu’il n’aurait pas fait bon rencontrer mon père. Je crois bien qu’ils auraient autant aimé tourner d’un autre côté, mais le comte, qui rageait froid de savoir mon père en liberté, les y forçait.
Ma mère, elle, ne vivait plus, la pauvre femme, étant toujours dans les transes, ne mangeant guère et ne dormant quasi plus, tant elle craignait que son Martissou ne fût pris. Elle se disait que, de force forcée, ça arriverait un jour, car d’espérer que jamais un mauvais hasard, ou la maladie, ou quelque canaille, peut-être, ne le ferait prendre, ça ne se pouvait bonnement. Et alors, la nuit, dans ses pensers pleins de fièvre, elle voyait la cour d’assises et la guillotine et gémissait longuement ; si elle s’endormait de fatigue, elle en rêvait encore et se plaignait toujours.
Il y avait un mois, tout près, que mon père était dans les bois, lorsque le comte de Nansac