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C’est bien comme disait le chevalier :


Cent ans bannière, cent ans civière !…

Quelques années après notre mariage, je parlais avec ma femme des quatre terribles jours que j’avais langui dans les oubliettes de l’Herm, et quoique ce ne fût pas la première fois, comme toujours en oyant ce récit, elle joignit les mains avec des exclamations pitoyables. Elle voulut connaître l’endroit, et, un dimanche, nous fûmes à l’Herm en nous promenant.

Arrivé devant ces ruines habitées maintenant par les chouettes et les ratepenades, un mouvement d’orgueil me monta en voyant mon ouvrage, en songeant que moi, pauvre et méprisé, j’avais vaincu le comte de Nansac, puissant et bien gardé. Lorsque ma femme vit dans le pavé de la prison, cette manière de trappe de pierre, ce trou noir par lequel on m’avait descendu dans les ténèbres de la basse fosse, elle eut un frémissement pénible et recula d’horreur.

— Ô mon pauvre homme ! comment as-tu pu vivre quatre jours et quatre nuits là-dedans !

En sortant de l’enceinte du château, je trouvai ce garçon qui avait fait le guet le soir de l’incendie. Il était marié dans le village maintenant, et il nous fallut de force entrer boire un coup chez lui. Là, tout en trinquant, nous parlâmes de cette nuit où nous avions fait justice de cette famille de loups, et alors lui me dit :

— Je ne comprends pas comment les gens du