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— Mon drole, je vous marierai au meilleur marché possible ; ce sera gratis, pour l’amour de Dieu.

— Merci bien, monsieur le curé, lui répondis-je en riant aussi, vous n’aurez pas affaire à des oublieux.

Comme bien on pense, notre noce ne fut pas une noce bien belle, et on ne se mit pas sur les portes pour la voir passer. Moi, je n’avais nul parent, à ma connaissance, sinon ce cousin de mon père qui demeurait vers Cendrieux, et dont je ne savais même pas le nom. La Bertrille était comme moi, à peu près, n’ayant que des parents éloignés, métayers autrefois du côté de Sainte-Orse, mais qui, depuis dix ans qu’elle les avait perdus de vue, avaient peut-être changé cinq ou six fois de métairie. Nous fûmes donc seuls chez le maire de Fossemagne et à l’église, et les premiers venus servirent de témoins.

Il y a des endroits, dans nos pays, où l’on présente le tourin, ou soupe à l’oignon, aux novis, sur la porte de l’église, lorsqu’ils sortent : mais nous autres, pauvres, sans amis, personne ne nous fit cette honnêteté.

En sortant de l’église donc, après avoir bien remercié le curé, j’empruntai le mulet et la charrette d’un homme du bourg que je connaissais pour lui avoir rendu un petit service, et je m’en fus avec ma femme chercher son peu de mobilier à Bars.

Ayant chargé le tout, ce qui ne fut pas long,