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Pourtant Jean me disait toujours lorsque nous en parlions :

— Méfie-toi de cet homme, il est capable de tout. Il fait peut-être le semblant de t’avoir oublié ; en ce cas, c’est pour te mieux attraper. Si tu n’as pas reçu encore un coup de fusil en courant la forêt la nuit, c’est qu’il te garde quelque chose de mieux. Il est fin et adroit, le mâtin ; et la preuve, c’est qu’il a tiré ses culottes de ces affaires d’enlèvement des fonds de la taille, dans la Forêt Barade, où d’autres ont laissé leur tête.

J’avais entendu parler en gros, au défunt curé Bonal et au chevalier, de ces affaires de la Forêt Barade et d’autres du même genre. C’étaient des nobles et des gros bourgeois du pays qui avaient entrepris de faire la guerre à la République, à la manière des chouans, et qui n’avaient trouvé rien de mieux que de lui couper les vivres en volant les fonds qu’on envoyait des sous-préfectures à Périgueux.

Il y a eu des attaques en plusieurs endroits du département, mais, rien que dans la Forêt Barade, il y en eut trois.

Le comte de Nansac était mêlé à toutes ces affaires, et même il était un des chefs de la bande qui travaillait dans la forêt. En 1799, une troupe de vingt-cinq à trente hommes bien armés, et masqués de peaux de lièvres, attaqua le convoi de la recette de Sarlat, escorté par trois gendarmes, pas loin de la baraque du garde du