traversés par des sentes de charbonniers plus ou moins fréquentées selon les temps et qui se croisaient juste dans ce creux.
Contre l’ordinaire des gens du pays, je n’étais point superstitieux, et je me moquais du Diable et de l’Aversier. Il m’est arrivé de ramasser à cette cafourche un double liard, déposé là par quelque fiévreux, sans avoir peur d’attraper les fièvres, comme le croyait le pauvre imbécile qui l’y avait apporté. Et lorsqu’en partant pour la chasse je rencontrais, cherchant son pain, la vieille Guillemette, des Granges, qui passait pour avoir le mauvais œil, ça ne me faisait pas rentrer à la maison, comme d’aucuns. J’avais beau voir aussi des oiseaux de mauvais présage, comme buses, pies, graules ou corbeaux, à droite ou à gauche, ça m’était égal. Le défunt curé Bonal m’avait débarrassé de bonne heure de toutes ces bêtises, de ces croyances au loup-garou, à la chasse volante, au lutin, aux revenants, qui au fond de nos campagnes se transmettent, dans les veillées, des grand’mères aux petits-fils, et font frissonner les jeunes droles et les filles tapis au coin du feu.
Ce qui m’occupait, c’était d’avoir le loup. Pour y arriver, je fis un affût au bord du fourré tout proche la cafourche, et, sur les minuit, j’allai attendre la rentrée de la bête dans son fort. Mais j’avais eu la bêtise de prendre le chemin qu’il suivait d’habitude, de manière que, m’ayant éventé, à une demi-portée