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Et ce fut des rires, des serrements de main, des amitonnements à n’en plus finir. Puis, comme elles étaient pressées de savoir comment je me trouvais là, il fallut leur raconter tout ce qui était arrivé au curé Bonal, et leur expliquer que nous étions venus demeurer dans son bien à La Granval. Elles n’en revenaient pas qu’un curé pût n’être plus curé et posât sa soutane. Quant à leur faire entendre que c’était parce qu’il avait prêté serment à l’époque de la Révolution, et ce qu’était ce serment, ça n’était pas facile, et je leur dis en gros que c’étaient d’autres curés appelés jésuites, grands ennemis des anciens curés patriotes, qui l’avaient fait casser.

Des jésuites ! elles n’en avaient jamais ouï parler :

— Et qu’est-ce donc que ces jésuites ? demandaient-elles.

— D’après ce que dit M. le chevalier de Galibert, c’est, parmi les curés, comme qui dirait des renards…

Elles se mirent à rire, et je leur parlai de choses plus aimables. Je fis entendre à Lina que maintenant, étant voisins à une heure et demie de chemin, nous pourrions nous voir plus souvent, et combien j’en étais content. Cela lui faisait bien plaisir aussi, mais elle craignait que sa mère ne s’aperçût de notre entente, et qu’elle lui défendît de me parler.

— Nous tâcherons qu’elle ne se doute de rien, lui dis-je ; et puis, après tout, peut-être ne se