Page:Eugène Le Roy - Jacquou le Croquant.djvu/256

Cette page a été validée par deux contributeurs.

du clocher fermée, furent demander la clef au marguillier, qui répondit que le curé lui avait défendu de la donner. Là-dessus, eux, enfoncent la porte du clocher avec des haches, et se mettent à sonner les deux cloches. Le curé vint pour les faire sortir, mais il fut obligé de s’en revenir plus vite que le pas et de se fermer chez lui. Cependant, au son des cloches, les gens des villages venaient de tous côtés, et bientôt, dans le mauvais chemin qui montait au bourg, on vit au loin un cercueil recouvert d’un drap blanc se mouvoir sur les épaules de quatre hommes qui se relayaient souvent, car la montée était rude, et il faisait chaud. En s’en allant, le curé avait donné deux tours de clef à la grande porte de l’église, de manière que ceux qui sonnaient s’y trouvaient pris. Lorsque le mort arriva, on le posa devant le portail sur des chaises prêtées par les voisins, puis on fut chez le curé pour avoir la clef ; mais la maison curiale était close, et personne ne répondit. Pourtant il aurait fallu être sourd pour ne pas entendre, car, après avoir cogné avec les poings, avec des bâtons, les gens finirent par jeter des pierres à la porte et dans les fenêtres. La colère montait les têtes de tout le monde ; des exclamations à peine contenues par la présence du corps s’entendaient au milieu d’une rumeur sourde. Sur les rudes visages de ces paysans on voyait l’indignation que leur causait le refus de ce qu’ils appelaient les honneurs, fait à l’un