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La noce fut triste, et sans la présence du joyeux savetier Gadras, l’un des témoins, elle eût été lugubre. Nul parent, point d’amis : la mariée, prétextant son deuil, n’avait voulu aucun invité. Le matin, elle fut à la mairie en robe noire, son mari l’escortant avec les voisins requis, dont le facteur infidèle. De là ils allèrent à l’église où le curé, pourtant peu tendre, regarda son ancienne première chanteuse comme s’il la plaignait. Pendant le dîner, elle ne s’assit point, occupée à servir les témoins, ses hôtes. Après avoir tablé jusqu’à quatre heures, ceux-ci, accompagnés du « novi », allèrent se promener, tous bien ouillés. Pour Reine, elle resta, alléguant l’impossibilité de laisser sa mère seule et le besoin de remettre tout en ordre. À mesure que le jour avançait, la malheureuse sentait venir, au milieu de frissons convulsifs, la nausée d’un horrible dégoût. Aussi, lorsque Capdefer rentra le soir, un peu coiffé pour avoir sifflé la linotte dans les cafés de Montglat et du Port, il trouva au lit une épousée froide comme un cadavre.

Le matin, Maurette se leva, écœurée, et, comme d’habitude depuis la maladie de sa mère, s’occupa du ménage. À l’heure du repas elle appela son mari :

— Venez déjeuner.

Il semblait qu’elle appelât encore leur ouvrier Capdefer.

Et il en fut toujours ainsi. Jamais elle ne le tutoyait. Lui, sentant la supériorité de Maurette, ne