Page:Eugène Le Roy - Au pays des pierres, 1906.djvu/81

Cette page a été validée par deux contributeurs.

lui adressait directement la parole que contraint et forcé par les circonstances. Très attentif d’ailleurs aux affaires de la maison, il travaillait à la boutique comme un nègre, ainsi qu’on dit, et prolongeait souvent les journées bien au-delà de l’heure habituelle. L’argent qu’il recevait de la vente et des repassages, il le remettait tout à la bourgeoise, sans en rien garder pour lui :

— Je n’en ai pas besoin, lui répondit-il, un jour qu’elle lui en faisait l’observation.

Lorsqu’il en était besoin, il prenait un homme pour l’aider et montait à la plaine du Roy faire les travaux de terre de la saison. Il décidait du moment des labours, des semailles, de la taille de la vigne et de tout. Pour le jardin, il y travaillait le dimanche par manière de distraction. Bref, en toutes choses du ménage, des champs, ou du métier, il tenait lieu du père Mauret, et même, il faut le dire, le remplaçait avantageusement, car le défunt, un peu gaudisseur et amateur de la dame de pique, avait plus souvent le gobelet ou les cartes au poing que la bêche à fouir, et passait plus volontiers le dimanche au café Montcazel qu’à son jardin. En un mot, c’était Capdefer qui faisait marcher la maison, vivre les deux femmes et suffisait à tout.

La mère Mauret se contentait fort d’avoir, dans leur malheur, rencontré un garçon aussi honnête et dévoué. Mais il n’en était pas de même de sa fille. Cette situation pesait à Reine ; il lui était extrêmement pénible d’avoir des obligations au Tétard, et