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— Et comment ça ?

— Regarde sur le chemin du Port !

Sur ce chemin s’avançait un grand garçon en veste de coutil, guêtré jusqu’aux genoux et coiffé d’un chapeau en paille de Manille. Maurette le reconnut soudain et devint rose.

— Marchons plus vite ! fit-elle.

— Pourquoi ? Il te fait peur ?

À dix pas de la porte, sous les remparts, Kérado joignit les deux amies et les salua, laissant voir son front partagé en deux par une ligne un peu oblique où le hâle s’arrêtait à la partie protégée du soleil par le chapeau. Il admirait la belle Reine, et il avait raison, ma foi ! Grande, svelte, sa démarche aisée malgré le fardeau, révélait, sous une mince robe d’indienne, des formes harmonieuses que le jeune homme osait à peine deviner. L’effort de la montée faisait palpiter les narines et soulevait le corsage de la petite, et, sous la seille de cuivre brillant, sa figure aux lignes pures se détachait avec une beauté de statue grecque. Dans ce paysage pierreux, brûlé du soleil, au pied de ces vieux murs roux où pendait un cactus poussé dans une meurtrière obstruée, à l’ombre d’un figuier au tronc difforme qui penchait sur le chemin, n’était l’ogive de la vieille porte, on eût dit à la voir une canéphore antique à l’entrée d’une cité de l’Hellade.

Si le Breton avait été seul avec Maurette, tous deux eussent été un peu embarrassés ; heureusement, Toinette était là.