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ce qui est un peu bien étrange, sur les religieux mâles dudit monastère aussi.

Au milieu, une table carrée à pieds tors était recouverte d’une fine touaille de ménage à grains d’orge, sur laquelle brillaient des gobelets de verre de fougère et deux flacons pleins d’un vin couleur de paille de froment. De belles assiettes de faïence à fleurs, surchargées de ce qu’on appelait autrefois des « friponneries », c’est-à-dire des pâtisseries légères, étaient disposées symétriquement entre les flacons. Outre une grande jatte de crème, des gelées de fruits et des noix confites, il y avait des crêpes, des oublies, des tartes, des « oreilles de curé », des « merveilles », des pets-de-nonne que ces dames religieuses appelaient plus modestement des « soupirs », et qu’elles avaient la réputation méritée de faire dans la perfection, et enfin des gaufres portant l’empreinte du sceau abbatial de Fontevrault.

Dom Cluzel s’asseyait d’abord, ainsi que Mme Angélique, et les deux autres sœurs restaient debout, par révérence. Mais incontinent le prieur disait :

— Mes sœurs, je vous en prie, asseyez-vous.

Et elles s’asseyaient, et l’on faisait honneur à toutes ces bonnes choses.

Dans ces occasions, mon parrain mangeait un petit peu plus qu’il n’eût voulu, pour ne désobliger ces bonnes religieuses qui, à tour de rôle, lui offraient de tout avec une aimable insistance.

— Monsieur le prieur, vous plaît-il de manger un de ces soupirs ? disait bonnement la grosse sœur dis-