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cher, était monté, Navarre me hissait sur le coussin de croupe et je m’attrapais à la robe de mon parrain.

— Tiens-toi bien ! me disait-il.

Et, le grand portail ouvert, nous partions en remontant la jolie vallée de l’Haut-Vézère.

Le chemin passait à Saint-Hilaire, devant la chapelle dépendant de l’abbaye, puis à Vaures, et ensuite au long des fossés pleins d’eau du château de La Borie, près de Saint-Martial-d’Hautefort. Les gens qui travaillaient dans les terres, nous voyant passer, levaient le bonnet :

Bien lou bounjour, moussu l’abbat !

— Bonjour, mes amis ! bonjour et bon courage !

Ayant rasé les vieilles murailles de l’église de Cherveix, nous suivions le chemin qui passait entre les prés et les chenevières, non loin de la rivière, et un quart d’heure après nous étions à Cubas.

Le jardinier du prieuré emmenait la mule à l’écurie et aussitôt nous étions amiablement recueillis par ces dames. Elles n’étaient pas beaucoup, trois seulement, et une sœur converse. C’était une joie pour elles que notre venue, ça les distrayait un peu, les pauvres, qui s’ennuyaient fort d’être là fermées. Dom Cluzel était alors âgé de soixante ans et avait les cheveux gris, mais c’était un homme de figure agréable, aimable, bien disant, qui savait beaucoup et avait de l’expérience. En sa qualité de père spirituel des religieuses, il était leur conseil et leur directeur de conscience. Il n’avait pas grand ouvrage avec la mère vicaire qui était vieille déjà, ni avec la sœur discrète, grosse et grasse per-