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Les pères ne se levaient pas de trop grand matin, sept heures en été, huit heures en hiver, sauf le cas où quelque petite indisposition les retenait au lit. Après avoir dit leur messe, ils déjeunaient chacun à son goût : soupe au lait ou chocolat, pour mon parrain, dom La Hyerce et dom Guerlot ; « croustet » de pain avec un petit fromage de Cubjac et un grand verre de vin blanc pour dom de Marnyhac. Quant à frère Luc, qui n’avait pas de messe à dire, lui, vers l’heure de prime, il faisait une bonne frotte à l’ail et buvait tranquillement sa chopine.

À midi, les pères passaient au réfectoire pour le dîner. C’était le principal repas, celui pour lequel frère Luc réservait ses plats friands qui faisaient pousser des exclamations à ces excellents religieux :

— Ô frère Luc ! vous nous induisez en péché de gourmandise !

— Mangez, mangez sans crainte, mes pères, répondait-il, Dieu a fait les bonnes choses pour les siens ! D’ailleurs, je prends la coulpe sur moi.

D’autres fois, lorsque humant l’odeur d’une bonne royale de lièvre, ou le fumet de perdrix qui montraient leur tête sortant d’un superbe chou, si les pères se récriaient en badinant, frère Luc leur disait :

— Allez, allez, mes pères, ça n’est pas dans l’ordre de la Providence que les lièvres et les perdrix meurent de vieillesse ! Ne vaut-il pas bien mieux que ce soit ses bons serviteurs qui mangent ces bestioles tant estimables, qu’un maraud de renard ?

Les grâces dites, chacun disposait de son temps