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sous le manteau de la cheminée, devant le foyer des Agrafeils.

Alors elle alla quérir une bouchée de pain et un verre de vin sur une assiette et la posa sur la haute coupe d’un des grands landiers de fonte. Puis les novis étant debout devant le feu, entourés de tous les parsonniers, elle dit :

— Devant Dieu qui nous voit tous, Albine, veux-tu être la femme de Michel Agrafeil ?

— Oui… ma Françoise.

— Et toi, Michel, veux-tu être l’homme d’Albine Agrafeil ?

— Oui, je le veux !

— Adonc, prenez ce morceau de pain et le mangez, dit-elle en le rompant.

— Maintenant, Albine, — ajouta-t-elle lorsqu’ils eurent fait, — bois la moitié de ce vin et donne l’autre à ton homme.

Alors, après qu’ils eurent bu, elle joignit leurs mains et dit :

— À cette heure, vous êtes mariés devant Dieu : C’est entre vous à la vie, à la mort !

— Et vous autres, mes gens, — ajouta-t-elle en s’adressant aux assistants, — soyez bons témoins et mémoratifs de ce mariage à la mode de nos anciens !

Ainsi, en dépit du curé et des autorités, hostiles, se perpétua au milieu d’une population catholique et à deux pas du fameux suaire de Cadouin miraculeusement retrouvé, la communauté huguenote des Agrafeils.