sur la terre et n’espérait ni ne redoutait rien après la mort. À la petite qui se désolait de le voir ainsi mourir, il remontrait que les pauvres gens ne perdaient pas grand’chose en mourant :
— Je ne regrette que toi, mon Albine ! lui disait-il un jour.
Il rêva un moment, puis ajouta :
— Il faudra te marier avec Michel… il n’y a que lui pour te défendre des gueux comme Malivert.
La pauvre petite ne cessait de pleurer, oyant ces propos. Elle aimait Pierre bien innocemment, comme son frère, aussi lui disait-elle bonnement à travers ses larmes :
— Je ferai ce que tu voudras, mon Pierre…
Lorsque Françoise était là, et que le malade montrait cette sorte de résignation fataliste du paysan, elle tâchait de tourner ses pensées vers l’espoir d’une meilleure vie là-haut.
— Ceux qui ont bien vécu, Dieu les récompensera dans son paradis, mon Pierre !
— Voire ! il est tout plein de voleurs et de scélérats, le paradis !
— Oh ! que dis-tu ?
— Sans doute ! Tous ces mauvais, ces méchants, ces injustes, qui ont envoyé aux galères et fait souffrir nos anciens de toutes les manières ; qui leur volaient leurs enfants et jetaient leurs morts à manger aux chiens, sont colloqués en paradis… Et de même ce maire qui nous fait des misères, ce Galinet qui est une canaille, cette Isabeau qui est une coquine ; tous