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— Et combien as-tu à faire encore ? demanda Michel lorsque l’accès fut passé.

— Je n’ai plus que dix jours… il faudra me venir chercher avec la bourrique… Je ne pourrais pas marcher…

Et la toux le reprit.

Aux Agrafeils, Petit-Pierre parut se remettre un peu. Il toussait moins, se redressait, sa figure était moins hâve, ses yeux meilleurs. Les autres pensaient le voir guérir, mais lui, contre l’ordinaire en ces maladies, se sentait perdu.

— Vois-tu, disait-il un jour à l’Albine, un peu plus tôt, un peu plus tard, il faut que je meure… Je sens quelque chose qui me mange les foies.

— Non ! non ! mon Pierre ! tu ne mourras point !

Et en pleurant, elle l’accolait pour l’embrasser.

Mais il la repoussait doucement :

— Tu prendrais mon mal ! disait-il.

Dans les premiers temps de son retour, il se promenait au soleil autour de la maison. Puis, lorsqu’il eut repris un peu de force, il s’en allait jusqu’à la forêt, marchant lentement avec un bâton. Quelquefois Malivert, le rencontrant sur une sente, l’interpellait rudement :

— Que viens-tu faire en forêt ?

— Vous le voyez bien… je me promène.

Le garde le voyant si chétif et si faible, le méprisait comme un ennemi impuissant, et n’avait aucun soupçon. Pour Pierre, nuit et jour, dans sa pensée, il se remémorait l’histoire contée par Françoise, de ce