— C’est bien du papier « marqué » ? demandèrent Tiennou et l’Isabeau, méfiants.
— Sans doute ! Voyez le timbre du roi.
Et Galinet se mit à écrire. Lorsqu’il eut achevé, il lut cette convention par laquelle Jean cédait sa femme à Tiennou avec tous ses droits maritaux quelconques, contre une petite mule d’un an que le dit Tiennou avait en cheptel à Soubartelle ; cession à laquelle l’Isabeau consentait, en ce que Tiennou lui faisait donation de son bien, l’usufruit réservé jusqu’à sa mort, en reconnaissance de sa jeunesse et de l’amitié qu’elle lui portait.
— Comme vous ne savez signer aucuns, vous allez faire votre croix et puis mettre votre pouce au-dessous, ajouta le praticien, la lecture faite.
Et tous trois ayant tracé deux bâtons croisés, noircirent leur pouce à la fumée huileuse du calel, et l’apposèrent sur le papier.
— Vous voyez, dit Galinet, il n’y a pas dans le monde deux personnes qui aient les lignes du pouce tracées et contournées de même ; ainsi ça vaut signature.
— Mais, dit Jean, et la procuration de Tiennou ?
— Ça, c’est un acte de notaire, mon pauvre, répondit Galinet. Demain nous irons à Cadouin à cette fin… Pour l’heure, ajouta-t-il narquois, Tiennou et l’Isabeau peuvent se retirer ; nous autres leur porterons la soupe à l’oignon.