deuil du dessein qu’elle avait conçu de mener la communauté sous son nom, un matin elle ramassa ses affaires et s’en fut à La Salvetat sans rien dire à personne. De ce moment, elle n’eut plus qu’une pensée : causer du dommage à la maison des Agrafeils, et la ruiner s’il était possible. Comme elle était coutumière de ces absences, les parsonniers ne s’en occupèrent pas tout d’abord. Cependant, au bout de sept ou huit jours, en soupant, Tiennou, toujours tracassier, dit à Jean :
— Cette fois-ci, ta femme t’a quitté pour tout de bon !
— À son aise ! Je suis bien tranquille maintenant, et je trouve que tu es beaucoup de loisir de t’occuper d’elle ! Si ça te fâche de ne plus la voir, va la trouver, je te la cède ! vois !
Les autres se mirent à rire, et il ne fut plus question de l’Isabeau.
Mais la tranquillité de Jean ne fut pas de longue durée. Le dimanche d’après, étant à Cadouin, à la sortie de la messe le pauvre diable trouva sa femme qui l’emmena dans un bouchon où se trouvait attablé un individu de mauvaise mine, petit, chafouin, l’air canaille. C’était un certain Galinet, qui se qualifiait de praticien ; sorte d’homme de loi marron, d’avocat de village, d’agent d’affaires retors et louche qui exploitait les paysans, leur faisant des « doubles », ou sous-seings privés, les défendant en justice de paix, s’entremettant dans leurs affaires, conduisant leurs procès et les faisant naître.