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— Voire ! Un scélérat comme ça ne vaut pas un chien comme notre Grisel ! répliqua Troisième.

Seule, pendant cette explosion de colères, l’Isabeau était restée calme, tout comme si elle eût été étrangère à la maison. Elle n’était d’ailleurs jamais entrée dans l’esprit de la communauté des Agrafeils. Le beau côté de cette association de famille lui échappait. Son intelligence étroite et égoïste était incapable de s’élever au-dessus de l’intérêt personnel de chacun, et ne concevait pas qu’un membre vieux comme Bertrand, faible comme Albine, ou maladif comme Liou qui avait souvent les fièvres, eût les mêmes droits et fût aussi bien traité comme les forts travailleurs, les bons ouvriers terriens qu’étaient les autres. Et puis elle aimait la maîtrise et aurait voulu commander dans la maison. Plusieurs fois elle s’était butée à la résistance calme et ferme de la Françoise, et avait dû céder, ce qui l’avait irritée contre la ménagère. De là un mauvais vouloir et une sourde hostilité contre toute la communauté, qui se montraient par ses refus de prendre part à un travail qui ne lui plaisait pas, son affectation de n’en faire qu’à sa tête, et sa mauvaise volonté en toutes choses. Avec ça, des paroles aigres, des noises hargneuses et des propos malveillants sur tout et sur tous, principalement touchant la ménagère.

Comme elle avait conservé la jouissance de son petit bien, la femme de l’Aîné s’en allait assez souvent à La Salvetat, sous le prétexte de voir comment le revenu se comportait et de faire soi-disant quelque