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— Elle a de bon vin blanc ! — disait-il en revenant.

— Et un joli petit bien ! — ajoutait Bertrand, — Tu as vu ? Son « baradis » est du pays de première qualité !

— C’est vérité !

— Et puis, il n’y a pas à dire, reprit le maître, c’est une fière fille !

Jean ne répondit rien, comme si ce point n’était pour lui qu’un détail indifférent.

Quelque temps après, tous les Agrafeils ayant vêtu leurs hardes neuves, se rendirent à La Salvetat en revenant de l’église. La Françoise avait bien proposé, après l’« enregistrement » devant le maire, de faire le mariage « sous le manteau de la cheminée », à la vieille mode des huguenots persécutés ; et l’époux aussi bien que tous les communiers inclinaient aisément à cet arrangement, en considération des quelques écus économisés sur le sacrement du curé ; mais la « novie » avait refusé, disant qu’elle voulait un mariage « pour de bon », et il avait fallu l’en croire.

Tous donc, en « sans-culotte », ou carmagnole de bure tissée de la laine de leurs ouailles, filée par les femmes aux veillées ou en touchant les bêtes aumailles, se trouvèrent attablés vers midi chez l’Isabeau. Celle-ci n’avait plus ni père, ni mère, ni parents, fors une vieille tante sourde comme un pot, mais bien endentée. Bertrand, le vieux maître, en « gipou » de grosse étoffe bleue dont le collet droit lui montait