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Le maître Bertrand prit la parole :

— En finale, dit-il, c’était une femme forte comme un cheval, entendant bien les affaires du ménage, sachant soigner les cochons comme pas une, ne craignant point sa peine, et pas mauvaise pour deux liards. S’il y a un bon Dieu, comme c’est à croire, elle est à cette heure colloquée en paradis… Trinquons à sa santé !

Et après avoir bruyamment choqué leurs gobelets, tous les convives burent jusqu’à la dernière goutte de vin.

Les parents du dehors étant partis, les gens des Agrafeils dépouillèrent leurs habillements des dimanches et, ayant pris leurs hardes des jours ouvrables, s’en furent dans les terres, emmenant trois paires de bœufs liés.

Petit-Pierre, avec l’ânesse, s’en fut au bois ramasser des châtaignes. La petite Albine fit sortir les brebis, et les toucha du côté de Bel-Air, accompagnée d’un gros mâtin armé d’un collier à pointes de fer. Quant à Françoise, elle resta au logis pour vaquer au ménage.

Le Pierre avait déjà rempli presque un sac de châtaignes, non sans s’être épiné plus d’une fois les doigts après les bogues, lorsque, au loin, il ouït les aboiements colérés d’un chien et la voix d’une bergère criant : Au loup ! au loup !

Attachant vite la bourrique à une branche d’arbre, le petit s’en courut de ce côté, et arrivé qu’il fut à l’orée d’une grande lande, il aperçut l’Albine tirant