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leur tête munie d’un « cabessal », ou torchon, tortillé en couronne et à cet usage destiné. Puis, les poings sur les hanches, elles gravissent lentement l’âpre colline, avec une détente du jarret à chaque pas. Il faut un bon quart d’heure pour remonter en ville, et elles arrivent là-haut, le sein soulevé, les narines gonflées, le sang à fleur de peau. À cette gymnastique souvent répétée, les muscles du cou et de la poitrine se développent avec une vigueur aidée par l’hérédité. Les jambes qui travaillent beaucoup aussi sont superbes, et les mollets des femmes de Monglat sont renommés dans tous ces cantons.

Elles gagnent encore à cet exercice une démarche gracieuse et cadencée. Ainsi, c’était un plaisir que de voir en ce moment marcher, se tenant le bras, ces cinq jeunes filles qui caquetaient de leurs amoureux, avec de petits rires égrenés, celles des extrémités penchant la tête vers les autres pour ne rien perdre de ce qui se disait.

— Voilà monsieur le curé ! fit tout à coup Maurette, en voyant passer dans la rue, au bout de la promenade, un prêtre de haute taille qui leur jeta un coup d’œil sévère.

— Aie ! Pécaïré ! Jésus !

— Allons à l’église, petites, dit la Ninie. Je vous finirai l’histoire en sortant.

Un instant après, elles entrent, trempent les doigts dans le bénitier, font le signe de la croix et vont se ranger devant la balustrade du chœur où le curé les attendait.