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— Oui… ma petite, fit-il en l’embrassant.

— Maintenant que tu es mon homme pour la vie et la mort, je suis bien heureuse ! murmura-t-elle en lui rendant son baiser.

— Ô ma petite femme ! que je t’aime !

Et, s’étant repris, ils s’oubliaient encore, lorsque l’amoureuse, revenant au sentiment de la réalité, le repoussa doucement :

— Va-t-en ! La Toinou se lève de bonne heure, elle te verrait.

Alors Blaise s’habilla lestement, enjamba la fenêtre et s’en alla d’un pas rapide.

La première « pique » du jour blanchissait la cime des hauteurs du côté de Salon, et les dernières étoiles pâlissaient au firmament. L’air était pur, la terre fraîche, et, dans les arbres, les oiseaux commençaient à pépier et à secouer leurs ailes humides. La rosée mouillait les ajoncs et les bruyères, et perlait aux toiles d’araignées tendues au travers de la sente qui montait aux taillis des Jaumards. Dans les fonds voisins, une légère vapeur laiteuse flottait, indécise, et au loin, entre deux coteaux, les brumes matinales s’élevaient au-dessus du vallon de Vern. Blaise marchait d’un pas assuré, la poitrine dilatée, ruminant les souvenirs de la nuit, plein des joies de la conquête, et le cœur gonflé de fierté virile, comme celui qui est homme pour la première fois.

En arrivant à la cime du terme, le garçon se retourna et regarda là-bas, au fond de la combe, la maison de sa Mondinette, où la cheminée commen-