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attaché les mains derrière le dos et emmené par la maréchaussée. Ensuite, les deux femmes échangèrent leurs craintes et leurs angoisses au sujet du malheureux tombé entre les mains du lieutenant du prévôt, et, en ce moment, resserré dans les « prisons royaux » de Périgueux. C’est que la terrible justice prévôtale qui condamnait à mort sans appel, et à laquelle le roi venait d’enjoindre de faire des exemples « avec célérité », était particulièrement redoutée.

Heureusement, malgré cette injonction, la prévôté ayant fort à faire pour réprimer des troubles du même genre sembla oublier les prisonniers. Puis, faute de place, elle les relâcha tous, excepté Jouanny.

Pendant longtemps, celui-ci languit sous les verrous tandis que sa sœur et Mme de Roquejoffre se désolaient. Par le messager, elles lui faisaient passer du linge, des bas et de petites douceurs. Il recevait tout cela avec le plaisir du prisonnier qui sent n’être pas oublié de ceux qui lui sont chers. Puis un jour, il eut une grande joie. Depuis longtemps, Mette et la veuve complotaient d’aller le voir : un matin, elles partirent avec Mathivet et firent courageusement le chemin à pied.

En les voyant entrer, conduites par le geôlier qui les laissa, Jouanny devint pâle et resta un instant sans pouvoir parler.

— Est-ce donc vous, madame Charlotte ! finit-il par dire.

— Pensiez-vous qu’on vous eût oublié ? dit-elle.