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deaux, était bien portée par un beau cou robuste. Ses yeux noirs, veloutés, profonds, brillaient au-dessous de deux sourcils légèrement arqués. Le nez, droit, fin, aux narines mobiles, continuait la ligne du front, et, sur la peau mate du visage, la bouche aux lèvres rouges avait une expression charmante de fierté juvénile. Cette belle « drole » de seize ans, c’était Reine, la fille de Mauret le coutelier, ou « Maurette », comme on la nommait souvent à la mode latine, en féminisant pour la fille le nom du père. Elle tenait un petit cahier à la main et semblait attendre quelqu’un, sans ennui comme sans impatience.

En ce moment même, trois jeunes filles venant du quartier de la porte Gauchère remontaient la rue du Consulat, traversaient la Place-Mage, et, bientôt après, débouchaient dans la rue du Grel en se tenant par le bras.

— Ah ! voilà Maurette qui nous « espère », dit l’une.

La petite descendit la marche de la boutique et vint se joindre à ses amies.

— Monsieur le curé n’a pas passé ? demandèrent-elles à Maurette.

— Pas encore.

— Alors, nous avons le temps.

Et toutes quatre s’en furent en babillant sous les tilleuls de la promenade, déserte en ce moment, comme le plus souvent les jours ouvrables.

Des trois nouvelles venues, l’une était Antoinette,