Page:Eugène Le Roy - Au pays des pierres, 1906.djvu/136

Cette page a été validée par deux contributeurs.

avait ouï dire à son défunt beau-père qu’il devait avoir trois ou quatre cents ans, attendu que dans un ancien terrier du seizième siècle il était déjà mentionné comme très beau et donnant son nom au tènement du Grand-Castang.

Actuellement il était gros comme un tonneau de quatre barriques, mais il ne restait que l’aubier ; l’intérieur était creux. Dans l’écorce, des sillons profonds semblaient des rides de vieillesse. À quelques pieds au-dessus de terre, une fente s’ouvrait, comme une large blessure, et de grosses branches, anciennement cassées par les orages, se levaient vers le ciel comme des bras mutilés. Plus une pousse, plus un drageon : il était bien mort.

Blaise, vigoureux drole, attaqua l’arbre par le pied, en poussant, comme il l’avait ouï faire, ces han ! han ! du charpentier qui aident à l’effort. Ayant coupé sans grand’peine, sur un côté, l’écorce et l’aubier à moitié pourris, avec un coin il élargit l’ancienne blessure et fendit l’arbre jusqu’au pied.

L’intérieur était tout plein d’une sorte de terreau formé par la décomposition du bois. Comme il faisait tomber ce terreau compact, soudain tous trois jetèrent un cri ; une tête de mort et des ossements apparaissaient au milieu de ce poussier.

— Sainte Vierge ! c’est quelque pauvre assassiné qu’on aura caché là ! s’écria la Toinou en se signant.

— Ou bien quelque mort d’une bataille du temps des guerres de religion ! dit la dame.