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les dindons cherchaient sous la feuille quelque châtaigne oubliée.

L’air était doux ; un petit vent de printemps passait à travers les châtaigniers dont les bourgeons commençaient à se déplisser. Une bonne odeur fraîche, faite de la senteur des mousses et des herbes des bois, flottait dans la combe solitaire. Dans les hauts, vers le Grand-Castang, le coucou chantait à force.

— Le coucou n’est pas mort, ni pris dans la terre des Anglais ! dit Blaise en faisant allusion à un vieux dicton patois.

— Que veut-il, qu’il ne cesse de chanter ? demanda la petite.

— Il appelle sa femelle…

L’enfant regarda le garçon en souriant, puis se mit à faire son bas. Lui était troublé ; cette idée l’émouvait, et il restait pensif, songeant à la signification de cet appel amoureux. Puis, le coucou s’envola au loin et, un moment après, du fond des taillis, monta un roucoulement de tourterelle, que Blaise écoutait en contemplant, sans mot dire, des cheveux follets bruns que l’air agitait sur le cou de la Mondinette. À quelques pas, deux coqs d’Inde rouaient autour des femelles avec des gloussements détonants et des frémissements d’ailes, métalliques. À ces incitations extérieures se joignaient les premières émotions d’une inquiète puberté. Une sorte de griserie envahissait Blaise, et une grandissime envie lui venait de baiser ces petits cheveux frisés qui se jouaient sur la nuque de la fillette.