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v. delbos. — husserl.

techniques de l’intelligence proprement humaine. C’est la différence qu’oublient des logiciens du genre d’un Stuart-Mill ou d’un Sigwart quand ils envisagent la science sous son aspect subjectif plutôt que sous son aspect objectif ; ils insistent exclusivement sur les problèmes méthodologiques.

2o La logique traite des représentations, des concepts, des jugements, des raisonnements, des démonstrations. Or ce sont là des phénomènes ou des opérations psychologiques : comment donc les propositions qui s’y rapportent ne seraient-elles pas psychologiques, elles aussi ? — Si cet argument avait une valeur quelconque, il devrait conduire à faire de toute science, même de la mathématique, une partie de la psychologie : car l’on ne se représente pas des nombres sans compter, on n’obtient pas des sommes sans additionner ni des produits sans multiplier. Toutes les opérations mathématiques sont liées incontestablement à des actes psychiques. Mais les objets des mathématiques, auxquels peuvent s’assimiler les objets de la logique pure, n’en restent pas moins des objets idéaux qui ne sont en rien donnés. La logique d’aujourd’hui confond trop facilement la série psychologique des faits de connaissance dans lesquels la science se réalise avec l’enchaînement logique des choses qui constitue spécifiquement la science.

3o Toute vérité consiste dans un jugement ; et nous ne tenons un jugement pour vrai que s’il est évident. Or l’évidence est un état psychique, un sentiment dont on peut déterminer, selon des relations causales, les antécédents psychiques. — Husserl ne conteste pas que ce caractère psychique d’évidence n’appartienne aux jugements vrais ; mais il conteste que ce caractère en constitue le fond. Le jugement évident dépend de deux sortes de conditions : d’abord de conditions psychologiques, telles que l’attention, la concentration de l’intérêt, la force d’esprit ; ensuite et essentiellement de conditions idéales qui valent pour toute conscience possible, et par suite pour notre conscience.

Ces préjugés dissipés, toute la force apparente du psychologisme s’évanouit.

Les arguments qui servent à réfuter le psychologisme atteignent également une conception toute voisine, la conception d’Avenarius et de Mach, qui explique les idées directrices et les règles de la science par le principe de la moindre action ou de l’économie de la pensée. Les étroites affinités de cette conception avec le psycho-