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autres formes de la vie mentale. Cependant, à mesure que la psychologie est devenue davantage une science d’observation positive et d’expérience, non seulement elle a dissipé de plus en plus le préjugé d’une vie mentale qui ne serait guère qu’une logique réalisée, mais encore elle a été portée à s’attribuer le pouvoir de ramener aux conditions du milieu psychologique la structure et le fonctionnement de la pensée logique. Par là, du reste, elle a souvent prétendu ne faire que manifester d’une façon particulière sa souveraineté, justifiée par le principe, qu’il n’est rien pour nous qui ne soit, directement ou indirectement, une donnée de la conscience.

Cette prétention de la psychologie à être toute la philosophie ou du moins l’essentiel de la philosophie a reçu dans ces derniers temps, principalement en Allemagne, l’appellation de « Psychologisme » : appellation dont je ne saurais dire qui l’a inventée — l’inventeur fut sans doute quelqu’un que la prétention offensait ; et ce n’est pas la seule fois qu’une doctrine a reçu de ses adversaires le nom attaché à sa notoriété ; — appellation qui en tout cas convient parfaitement, dès qu’à l’usage s’efface le souvenir de la petite intention malveillante qui a pu l’inspirer. Cependant, malgré la force croissante que lui conféraient les conquêtes de la Psychologie, le psychologisme devait se heurter à ce qui, dans la connaissance authentique des choses, en constitue l’objectivité, impossible à résoudre, semble-t-il, en simples états ou données de la conscience : d’où, par action, un effort en vue de reconstituer avec une rigueur plus systématique la logique indépendamment de la psychologie, et pour les conceptions issues de cet effort le nom de « Logicisme ». « Psychologisme » et « Logicisme », sont des termes nouveaux pour d’assez anciennes choses. Le Logicisme, je viens de le dire, a été, comme doctrine ou comme tendance, inhérent aux philosophies rationalistes et même parfois aux autres ; quant au Psychologisme, n’est-il pas, depuis Hume et même depuis Berkeley ; la caractéristique de l’École anglaise, très portée, comme on sait, à ne voir dans les rapports logiques que des schèmes, fictifs dans leur abstraction, de relations mentales concrètes ? N’est-il pas la disposition la plus foncière du récent pragmatisme ? Cependant c’est surtout en Allemagne et en Autriche que Psychologisme et Logicisme se sont rencontrés sous cette forme expresse. Constitué par Brentano, le Psychologisme est représenté, avec des nuances de pensée d’ailleurs différentes, par des philosophes tels que Marty, Stumpf, Lipps, Uphues, etc. ; il