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combien de vains prétextes, sans aucun profit pour le cœur, ne prétend-elle pas opprimer la raison ?

Votre divan reconnut les ruses ambitieuses de ces petits tyrans ; il voulut vous représenter que ces prétendus favoris du prophète s’étaient plus d’une fois rendus maîtres des intrigues du sérail : il vous rappela qu’on avait souvent vu d’insolents mouftis se prétendre autant au-dessus des sultans que les anges surpassent les mortels, et s’arroger le droit de disposer de l’empire ; il voulut vous faire considérer que, quoique leurs vices et leurs désordres eussent désabusé les peuples, il était à craindre que ces hommes dangereux ne relevassent les ruines de leur monstrueux pouvoir à la faveur des opinions, des maximes qu’ils semaient dans les esprits du vulgaire. Ce sage divan tenta de vous faire remarquer combien toutes ces ruses portaient atteinte aux lois, au repos, à votre pouvoir même ; ce fut en vain : par un enchantement prodigieux, les conjurés écartèrent la vérité de votre trône ; ils firent passer le zèle de ce corps respectable pour une offense ; vous l’exilâtes.

Après cela, puissants monarques, qu’il me soit encore permis de vous demander quel est ce pouvoir dont vous vous montrez si jaloux ? Il est souvent le jouet du fourbe ou du flatteur, qui sait vous fasciner les yeux. Les méchants font de votre sceptre le fléau du sujet fidèle.

Ces exemples prouvent donc que, dans le monde moral construit comme il est par des mains mortelles, il n’y a ni véritable subordination ni véritable liberté.



Vraies causes de la décadence et des révolutions des états les plus
florissants.


Depuis le sceptre jusqu’à la houlette, depuis la tiare jusqu’au plus vil froc, si l’on demande qui gouverne les