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Dans les derniers temps, et même de nos jours, les Bacon, les Hobbes, les Locke, les Pope, les Montesquieu, etc., ont tous aperçu que la partie la plus imparfaite de la philosophie était la morale, tant à cause de la complexité embarrassante de ses idées que par l’instabilité de ses principes, par l’irrégularité de sa méthode, qui ne peut rien réduire en démonstration, trouvant à chaque pas des propositions dont la négative peut également se défendre.

Ces difficultés ont rebuté partie de ces grands hommes, jeté l’autre dans un doute général ; quelques-uns seulement ont essayé de décomposer ce tout, d’en examiner séparément les pièces, mais sans oser rien conclure, soit qu’ils n’aient pu découvrir le premier pli de ce nœud compliqué, soit qu’ils se soient contentés de le laisser deviner, après avoir mis sur les voies.

Principes des erreurs des moralistes anciens et modernes ; ce qu’ils auroient dû faire pour les reconnaître et les éviter.

J’ai tâché de découvrir ce premier chaînon de l’erreur, et de rendre sensible ce premier point divergent qui a toujours éloigné nos moralistes et nos législateurs de la vérité. Écoutez-les tous ; ils vous poseront pour principe incontestable et pour base de tous leurs systèmes, cette importante proposition : L’homme naît vicieux et méchant. Non, disent quelques-uns, mais la situation où il se trouve dans cette vie, la constitution même de son être, l’exposent inévitablement à devenir pervers[1].

Tous prenant ceci à la rigueur, aucun ne s’est imaginé qu’il en pouvait être autrement ; aucun, par conséquent,

  1. Combien d’impertinences en prose et en vers n’a-t-on pas dites sur ce sujet !