Page:Etienne-Gabriel Morelly - Code De La Nature.djvu/42

Cette page a été validée par deux contributeurs.

les faire briller avec plus de charmes. Je ne leur laisse dans cette dissertation d’autres ornements que leur propre évidence. Tel est le déplorable état de la raison, qu’il faut faire mille efforts, user de mille stratagèmes, pour déchirer le bandeau qui l’aveugle, et lui faire tourner les yeux vers les vrais intérêts de l’humanité : c’est le but de la Basiliade. Après avoir dit un mot du sujet et de la conduite de ce poëme, j’expose ici tout nuement le système de sa morale

Réflexions générales
sur la conduite et le but de la Basiliade.

Il semble que l’auteur ait pensé que, sans étudier la Poétique d’Aristote ni ses commentaires, on pouvait, à l’aide d’une imagination vive, dirigée par le jugement, construire un poëme épique dans toutes les règles de l’art ; ces règles sont elles-mêmes fort postérieures à l’exercice du génie sur des sujets héroïques, et c’est des productions de ce feu de l’âme qu’elles ont emprunté leur autorité. En un mot, comme on a raisonné, et raisonné juste, avant qu’il y eût une logique artificielle, il y a eu de très-beaux poëmes avant qu’on s’avisât d’observer comme ils étaient construits.

Je crois comme lui qu’en rendant justice aux ingénieuses rêveries des anciens et des modernes qui se sont signalés, on pouvait ouvrir une nouvelle carrière à l’épopée, et bâtir sur un plan dans lequel il n’entrât rien des actions fougueuses, de ces événements tragiques et sanglants, ni de ces aventures romanesques que les grands poëtes ont estimé dignes de leurs chants.

Les fictions de ces hommes célèbres tiennent toutes aux préjugés religieux, politiques et moraux des nations