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sante, par les mêmes degrés que dans l’hypothèse précédente ; mais cependant avec cette différence, que les accidents fâcheux auxquels la cause première l’aura laissé sujet, l’avertiront que les intentions de la Providence sont que la créature soit elle-même bienfaisante ; avec cette différence encore, que dans la supposition précédente, l’homme n’aurait presque qu’une idée purement passive de bonté ; et sans celle-ci, outre l’idée du bienfait reçu, il apprendrait à connaître par lui-même ce que c’est qu’être bienfaisant. Alors la créature aurait quelque idée de ressemblance entre elle et la Divinité ; et comme ses qualités la disposeraient à s’estimer la plus parfaite, la plus aimable de toutes les créatures, elles la porteraient à croire que la cause première est autant au-dessus de l’humanité, que celle-ci s’estime au-dessus des autres êtres : donc, plus elle concevrait une haute idée de la bienfaisance en général, et plus elle aurait une idée sublime de la Divinité ; plus encore l’industrie, la prudence qui aideraient la créature à se garantir des accidents passagers de cette vie, et plus aussi le plaisir de s’en être préservé, ajouteraient à l’idée d’un être infiniment bon. Par dessus tout cela, l’idée d’une infinie sagesse serait une conséquence de celle des mortels.

A l’égard des accidents fâcheux, la réflexion accoutumerait les hommes dans ce système, comme dans le nôtre, à les regarder plutôt comme des avis destinés à réveiller l’idée d’un bienfaiteur souverain, à rendre l’homme attentif à sa conservation, que comme de véritables maux. D’ailleurs, la raison leur ferait souvent remarquer que ces accidents ne sont nuisibles qu’à certains égards, et sont en général de fort bons effets.

On peut donc conclure que l’homme, dans ce second système, aurait encore des idées de la Divinité plus relevées que dans le premier.