Et sur la hauteur sainte où brûle votre feu,
Vous consumez un homme et vous faites un dieu !
Mais les disciples de Fourier, en lisant ces vers, ne manqueront pas de se souvenir que leur Maître a fait de l’attraction passionnelle la loi de l’univers moral, et qu’il a vu dans le libre jeu des passions se développant sans heurt et sans contrainte, le principe même de l’universelle harmonie et la collaboration au plan divin. Voici enfin la parabole des Épis — car c’est bien, dans un cadre apocalyptique, une parabole à la manière de l’Évangile, — qui semble avoir été composée tout exprès pour réconforter leur courage et les exciter à poursuivre sans trêve leur propagande. Le poète est transporté en esprit sur le sommet d’une montagne. De là, il voit, sur toute l’étendue du globe, des millions et des millions d’épis poindre et surgir au-dessus des sillons, parure de la terre, émerveillement du ciel. Mais, tandis que la moisson dorée se balance dans la lumière, sournoisement, insensiblement, les herbes mauvaises, la ronce, l’ivraie, se glissent parmi elle, l’envahissent et l’étouffent. Est-ce donc là le sort réservé à toute généreuse pensée ? De toutes les forces de son âme, le poète proteste contre le « sens terrible », contre la « leçon d’enfer »
Non ! quelle que soit l’ombre où vainement médite
L’humanité perdue en sa route maudite,
Enfants de Dieu, certains de l’appui paternel,
Apôtres ignorés de son dogme éternel !
Vous qui, pour la nature inépuisable et belle,
N’avez jamais trouvé votre lyre rebelle,
Oh ! non, dans ce tumulte où vont mourir vos voix,
Comme l’oiseau qui chante en la rumeur des bois,
Que le siècle aveuglé vous brise ou vous comprime,
Ne désespérez point de la lutte sublime !
Épis sacrés ! un jour, de vos sillons bénis,
Vous vous multiplierez dans les champs rajeunis,
Et dépassant du front l’ivraie originelle,
Vous deviendrez le pain de la vie éternelle
Si la pensée est flottante, les vers sont éloquents, et je regrette de ne pouvoir citer plus largement les pièces auxquelles ils appartiennent et qui demeurent enfouies dans la revue fouriériste où il n’est guère facile d’aller les chercher. Ils firent sensation parmi