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LES ORIGINES, L’ENFANCE ET L’ADOLESCENCE

et, plus loin, la Table épand sa blanche nappe de brume, comme un voile, sur les blanches maisons du Cap que l’on distingue au fond de la baie. Là sont

ancrés vingt-huit navires de toutes nations.


Quand il descend à terre, c’est un émerveillement d’une autre nature. Le Cap est « une ville tout à fait européenne » : elle a « des rues larges et bordées de fort belles maisons anglaises, des magasins très brillants à l’extérieur, une immense place d’armes, une vaste bourse, un palais de justice… » Leconte de Lisle la visite à loisir. Il explore aussi les environs il se rend, avec ses compagnons de voyage, chez un riche propriétaire de Constance, M. Cloots. « Comme il n’y était pas, nous entrâmes au salon pour nous reposer. M. Lenoy marchait devant nous ; il s’arrête tout d’un coup et recule, tout interdit ; nous avançons… Une panthère énorme, accroupie au fond de l’appartement, fixait sur nous ses yeux brillants et féroces ; sa queue se redressait à l’entour de ses flancs tachetés et sa mâchoire entr’ouverte laissait voir de blanches et longues dents qui ne nous rassuraient pas. Cet animal était empaillé avec tant d’art qu’il était impossible de ne pas le croire vivant. » Ce fut la première rencontre de Leconte de Lisle avec


La reine de Java, la noire chasseresse,


dont la silhouette sinueuse et souple traverse les Poèmes Barbares. Il entendit hurler sur la grève du Cap les chiens sauvages dont il devait, bien des années plus tard, interpréter les lamentables aboiements. Il vit des babouins et des autruches. Il put même contempler de près deux lions, vivants cette fois, un mâle et une femelle. Il est vrai qu’ils étaient en cage. Le mute n’a que deux ans, il est déjà magnifique ; ses bonds sont effrayants et sublimes ; quand il rugit, les murs de sa prison en tremblent. » Mais plus qu’aux animaux féroces, empaillés ou non, il s’intéressa aux dames du pays. Il les trouva, en général, « assez mal faites Mais il y avait des exceptions ; et, en cette matière, c’est l’exception qui importe. « Nous logeons, écrivait-il, chez Mlle Bestaudig, grosse Hollandaise très gaie. Elle a deux nièces fort jolies, qui nous font de la musique chaque soir et chantent en hollando-