Un poète évoque à nos yeux les peuples d’autrefois, les races éteintes, les civilisations disparues ; à sa voix, cette poussière se réveille et recommence à vivre elle retrouve sa religion, ses dieux, ses rites, ses mœurs, ses légendes ; elle reprend son âme, fruste, naïve et sauvage, guerrière, voyageuse ou pastorale. Dans les cadres qu’il a ainsi restaurés, il place quelques grandes figures en qui s’incarnent les passions qui ont agité l’humanité primitive l’orgueil qui s’égale aux dieux, l’amour qui attire ou qui donne la mort, la bravoure qui la méprise, la haine, la vengeance, le fanatisme. Il célèbre la beauté magnifique de la nature ; il la contemple, il l’admire, il aspire à se fondre et à se perdre en elle ; ou bien il suit dans leurs courses, dans leurs chasses, dans leur repos et dans leurs jeux les animaux superbes qui hantent la jungle ou la forêt il comprend leurs instincts, il devine leurs rêves, il interprète leurs vagues angoisses. Du spectacle des hommes et du spectacle des choses il extrait une philosophie amère, qui retourne et remâche sans répit les causes de notre souffrance, et ne lui offre de consolation que dans la conviction de la vanité universelle et dans la perspective du gouffre insondable où tout est destiné à s’engloutir
Le secret de la vie est dans les tombes closes.
Ce qui n’est plus n’est tel que pour avoir été,
Et le néant final des êtres et des choses
Est l’unique raison de leur réalité[1].
- ↑ Poèmes Tragiques : Le secret de la vie.