Cette œuvre est belle, d’une beauté régulière, harmonieuse et calme, pure de lignes comme l’antique dont elle est souvent inspirée, voluptueuse et chaste à la fois comme lui. Elle a la splendeur du marbre auquel on l’a souvent comparée ; elle en a aussi, disent ceux qui ne l’aiment point, la froideur. On reproche au poète de n’avoir atteint la perfection de l’art qu’aux dépens du sentiment, d’avoir modelé des formes admirables et peint des tableaux magnifiques, mais de n’avoir pas donné de vie à ces tableaux et de n’avoir pas mis une âme dans ces formes. On lui en veut surtout de n’y avoir rien mis de la sienne, de n’avoir rien trahi, dans sa poésie, de l’homme qu’il était sans doute, semblable à nous, faible et passionné comme nous, d’avoir été non seulement impersonnel, mais impassible. C’est un grief que confirme trop facilement une lecture superficielle de Leconte de Lisle. Il vaut la peine de l’examiner spécialement et de le discuter à fond.