il faut le faire, ou se taire. Tu m’avoueras que ce quatrain-ci est par trop fort :
Rose était aimableet jolie,
D’une mère faisait l’orgueil ;
Elle devait aimer la vie :
Pourquoi l’as-tu mise au cercueil ?
C’est vraiment trop prosaïque. Et ce dernier vers :
Au ciel elle donna la main.
Que veut dire cela ? Quelle incorrecte expression ! Quelle gêne il y a dans tout cela ! Combien est plus douce, et mieux dite, la même pensée rendue ainsi par Rességuier :
Plus de roses d’hymen… plus de rêves de miel !
Oh ! sa mort est sans doute un doux et saint mystère !
Une vierge de moins gémira sur la terre,
Un pur ange de plus sourira dans le ciel !
La page est amusante ; elle a de la verve, de l’entrain, du mordant. Il ne faudrait pas toutefois en exagérer la pénétration. Les vers de Dayot — au moins ceux qui sont cités ici — sont d’une platitude à soulever le cœur. Et si la sévérité du jeune homme à leur endroit est amplement justifiée, le pêle-mêle de ses admirations nous surprend un peu, et certaines d’entre elles nous font sourire. Nous ne sommes pas persuadés que le quatrain maniéré de Rességuier vaille beaucoup mieux en son genre que l’octosyllabe raboteux auquel il est opposé comme le jour à la nuit. À cette époque, et à dix-neuf ans à peine, il était permis de s’y tromper. Au début du séjour en Bretagne, le goût de Leconte de Lisle n’est pas encore formé ; il se ressent de la jeunesse du poète et de son origine exotique. Notre créole est un fervent partisan de la poésie sentimentale : inclination, en soi, nullement blâmable mais il confond le sentiment avec la mièvrerie, la grâce avec ce qu’il appelle « la gracieuseté », l’élégie avec la romance. Des Voix intérieures, qui viennent justement de paraître, il s’empresse d’extraire et de copier, pour les envoyer à Adamolle, des morceaux comme La Tombe et la Rose, et la piécette qui débute par ces vers :