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forme naît de la combinaison des matières. Plus la matière est abondante et variée, plus la forme est sublime. Un enfant divin ne peut être le fruit que de parents immortels. La forme redevient pour ainsi dire la matière d’une forme plus belle encore. Ainsi la fleur se change en fruit, et ce fruit lui-même fournit la semence d’une nouvelle tige qui se couvrira de fleurs. Plus la variété augmente avec la délicatesse de la matière, plus grande est la force, car plus intime est la liaison. La forme paraît pour ainsi dire se fondre dans la matière et la matière dans la forme ; ou bien, pour parler sans figure, plus les sentiments de l’homme contiennent d’idées et plus ses idées contiennent de sentiments, plus sa supériorité devient inaccessible. De cet accouplement éternel de la forme et de la matière, de la diversité et de l’unité dépend la fusion de l’homme dans l’homme, des deux natures réunies, et de cette fusion dépend sa grandeur. Mais la force de cette union dépend de la force de ceux qui s’unissent. Le plus beau moment dans la vie de l’homme est le moment de la fleur[1]. Le fruit de la forme la moins gracieuse, la plus simple, fait deviner la beauté de la fleur qui sortira de lui pour s’épanouir. Tout se précipite vers la floraison. L’objet qui naît immédiatement est bien éloigné de la forme charmante à laquelle il arrivera plus tard. La tige grosse et lourde, les feuilles larges, pendant chacune de leur côté, ont besoin d’une forme

  1. De la fleur, de la maturité (Nouveau Muséum allemand, 1791, 22, 23 juin). xxxx(Note de l’auteur.)