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L’État fut donc forcé de recourir aux Tribunaux pour se faire réintégrer dans sa propriété, mais c’est alors qu’on se heurta à de nombreuses difficultés et que la situation immobilière du Sénégal se révéla comme un véritable imbroglio.

De part et d’autre, on cria à la spoliation, et la jurisprudence, en présence d’une question aussi complexe et aussi confuse, préféra trancher les litiges par des considérations de fait et d’équité.

Cependant, le côté juridique de la question offre un intérêt capital, car à l’envisager sous cet aspect, on peut aisément trouver le moyen d’asseoir sur des bases définitives, la propriété immobilière et de clore ainsi un débat stérile et irritant.

À cet égard, il importe de rechercher quelle était, sous la domination indigène, l’organisation foncière du Sénégal et quelle transformation elle a subi du fait de l’occupation française.

Propriété indigène.

Quel était le régime des terres sous les anciens souverains indigènes ? Sur ce point, aucune controverse n’est possible. Les traditions les plus anciennes nous montrent qu’au Oualo comme dans le Cayor et les autres localités, la terre appartenait au prince. La souveraineté et la propriété se confondaient dans la personne du brak ou du damel. Nul ne pouvait détenir une portion de terre qu’en vertu de leur permission, laquelle était toujours révocable. Il était, à la vérité, loisible au possesseur de louer sa terre et de percevoir, pour prix de sa location, une redevance en nature, mais il lui était expressément défendu, sous peine d’être expulsé du pays, de consentir une aliénation. Enfin, la durée de la concession était limitée à la vie du souverain qui l’avait consentie ; mais, en fait, les concessionnaires restaient le plus souvent en possession des terres qu’ils détenaient ; seulement, pour rendre hommage au principe, que la propriété était un attribut de la souveraineté, ils se présentaient au nouveau souverain duquel ils obtenaient, moyennant un cadeau, une nouvelle investiture.

Ainsi donc, au Sénégal, la condition des terres était assez