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LES MAISONS DE FOUS.

lade. Et quelle maladie, grand Dieu ! — L’étude de la folie devra nous servir à reconstituer chez l’homme les élémens de la raison.

Quand on entre pour la première fois dans un élablissement d’aliénés, on se croit le jouet d’un rêve pénible : une pitié douloureuse, un effroi glacial vous oppressent. La raison doute d’elle-même et ne trouve plus sa route dans ce monde nouveau dont toutes les images sont bouleversées. Les aliénés ne ressemblent pas aux infirmes qu’on rencontre dans les autres établissemens, et chez lesquels le corps languit : ici c’est l’hôpital de l’âme. Regardez autour de vous : dans ces créatures effacées, l’ombre de l’homme, souvent même l’ombre de l’animal, se montre à peine. La figure du monde est voilée pour elles ; les élémens de l’intelligence sont rentrés dans la confusion du chaos. Est-il une douleur égale à cette douleur infinie ? Nous sommes ici dans la cité lamentable. L’esprit a précédé ces êtres humains dans la mort ; ils existent, et ils ne vivent déjà plus. Le médecin passe, il parle d’eux devant eux, et ces malades servent, sans y rien comprendre, d’objet à ses démonstrations. Quelquefois la vanité accourt à sa rencontre et se drape coquettement dans quelques haillons pour attirer des regards qui se détournent tristement. Souvent encore ce sont, chez les femmes, les plus chastes vertus de leur sexe qui se montrent comme violées soudain par le délire. On les voit affecter des poses et des gestes cyniques. Ces actes, dont la volonté est absente, sont parfois accompagnés des rougeurs pénibles de la honte. Que faire à de semblables maux ? Le méde-